Arrêtez de blâmer le CrossFit!

Arrêtez de blâmer le CrossFit!

Combien de fois n’avons-nous pas entendu parler des problèmes d’épaules liés au CrossFit? Malheureusement, avec la hausse de popularité de ce sport dans la dernière décennie, plusieurs rumeurs ont commencé à circuler en rapport au lien entre celui-ci et les blessures aux épaules. De telles rumeurs nuisent au CrossFit qui n’est pourtant pas la cause de ces blessures. Il est toutefois très facile d’y infliger le blâme lorsqu’on le connaît peu. D’ailleurs, plusieurs rejettent l’idée de l’essayer par peur de se blesser et, par le fait même, passent à côté de l’opportunité de découvrir une forme d’activité physique qui aurait pu leur plaire énormément. Il semble donc être nécessaire de clarifier les origines des blessures aux épaules telles qu’observées en CrossFit. 

La source principale de ces blessures prend racine dans le volume d’entraînement. En effet, pour ne pas vanter le CrossFit, celui-ci semble avoir un effet addictif sur les adeptes d’activité physique, particulièrement dans les premiers mois après l’avoir découvert. D’un point de vue de promotion de l’activité physique, cet effet sur la popularité et donc l’évolution du sport est bénéfique. Toutefois, si un individu ne dispose pas d’une bonne expérience d’entraînement impliquant des mouvements overhead et/ou s’il ne possède pas un niveau de force musculaire adéquat pour ces mouvements, les risques de blessures aux épaules vont nécessairement augmenter.

L’épaule, comme la hanche, est une articulation dite “sphéroïde”. Cela lui confère une liberté de mouvement et une amplitude assez élevée. La hanche possède un support ligamentaire et tendineux significativement plus fort que celui de l’épaule, ce qui lui permet de résister à des stress bien plus importants. En revanche, l’articulation scapulo-huméral, l’épaule, est l’une des articulations les plus fragiles et instables du corps humain..   Pour stabiliser ce type d’articulation, le corps possède une coiffe des rotateurs : ensemble de muscles qui retiennent la tête de l’humérus (l’os du bras) dans la cavité glénoïde. Les muscles qui composent la coiffe des rotateurs de l’épaule sont considérablement plus petits et moins forts que ceux de la coiffe des rotateurs de la hanche, ce qui confère une capacité de résistance au stress relativement faible à l’épaule. Composé de l’infra-épineux, du petit rond, du sous-scapulaire et du supra-épineux, elle a également une fonction primordiale de stabilisation de l’épaule lors de tous mouvements de l’articulation. Sans elle, les mouvements fins seraient impossibles. La coiffe est particulièrement impliquée lors de mouvements overhead, surtout lorsque le mouvement est chargé. Évidemment, plusieurs autres muscles s’attachent au niveau de l’épaule et participent également à stabiliser celle-ci. Il n’est donc pas sans dire que ces différents muscles peuvent être impliqués dans les blessures à l’épaule. Toutefois, les blessures les plus récurrentes affectent principalement les muscles de la coiffe des rotateurs. Leur rôle de stabilisateurs de l’articulation et l’emplacement de leur insertion les prédisposent aux blessures, plus particulièrement aux tendinopathies et aux déchirures partielles et complètes.

La caractéristique anatomique liée à l’emplacement de l’insertion des tendons des muscles de la coiffe des rotateurs est une composante importante dans les mécanismes lésionnels auxquels la coiffe est associée. En effet, les tendons des 4 muscles concernés s’insèrent tous sur la tête de l’humérus. Toutefois, l’espace entre la tête d

e l’humérus et l’acromion, la protubérance osseuse à l’extrémité de l’épaule, entre autres, est relativement faible. Lorsque le bras est en position overhead, les tendons de la coiffe, principalement le supra-épineux et le sous-scapulaire, sont donc comprimés entre la tête de l’humérus et l’acromion (et d’autres structures osseuses et ligamentaires). Le long chef du biceps, qui s’insère sur le bord supérieur de la cavité glénoïde, est également souvent comprimé lorsque l’espace sous-acromial est restreint. Ce phénomène de friction des tendons sur les structures osseuses est surnommé Accrochage (impingement). Lorsque la friction causée par la compression est très récurrente, si une charge est soulevée de façon répétitive au-dessus de la tête par exemple, et qu’elle surpasse la capacité de résistance et de régénération des tendons, alors ceux-ci développent de l’inflammation. Si ce phénomène est répété sur une base régulière, une tendinite va donc se développer. Somme toute, la tendinite est une inflammation chronique d’un tendon.

L’évolution étant une formidable machine, une bourse est positionnée dans l’espace sous-acromial pour réduire les effets de la friction entre les tendons et l’acromion. Cependant, cette bourse a une limite à ses effets protecteurs et peut également souffrir de l’effet de compression. D’ailleurs, une bursite, une inflammation de la bourse, peut survenir lorsqu’une tendinite de la coiffe des rotateurs persiste. L’espace sous-acromial peut varier en fonction de plusieurs facteurs : la forme de l’acromion, une faiblesse d’un ou plusieurs muscles de la coiffe des rotateurs, une mauvaise mécanique de mouvement, la coordination intermusculaire déficiente, le manque de mobilité thoracique et autres. 

Un facteur génétique peut effectivement entrer en jeu en ce qui a trait à l’acromion. Il existe 3 principaux types d’acromions documentés : le type 1, le type 2 et le type 3. Le type 1 est plat, le type 2 est courbé et le type 3 est crochu. Il va donc de soi que le type 3 est celui qui est habituellement le plus associé aux tendinites à l’épaule. En effet, plus l’acromion est courbé vers le bas et plus l’espace sous-acromial diminue. Les risques d’accrochage sont donc plus élevés chez les individus qui possèdent des acromions de type 3.

Un des problèmes les plus importants liés aux tendinopathies de la coiffe des rotateurs est une dyskinésie au sein des muscles de la scapula (l’omoplate). Une dyskinésie scapulaire représente une dynamique musculaire anormale des muscles, incluant ceux de la coiffe, qui mobilisent et stabilisent les scapulas. En jargon de kinésiologue ou de physiothérapeute, c’est une perturbation du rythme scapulo-huméral. Lorsqu’un ou plusieurs muscles sont trop faibles par rapport à la charge de travail qui leur est imposée, la fluidité et la précision normale du mouvement de la scapula sont affectées. L’épaule est guidée par la scapula. Ainsi, lors des mouvements de l’épaule, la scapula bougera de manière à maintenir une certaine distance entre l’acromion et la tête de l’humérus; si celle-ci ne bouge pas optimalement, la mécanique au niveau de l’épaule sera également défaillante. Dans le cas de l’espace sous-acromial, cette mécanique musculaire anormale cause une réduction de l’espace et ainsi une compression des tendons des muscles de la coiffe et du long chef du biceps. Très souvent, ces dyskinésies au niveau des scapulas sont relativement faciles à observer. Lors d’une traction à la barre, par exemple, un individu avec une mécanique de mouvement des scapulas déficiente a habituellement une épaule plus élevée que le l’autre. De plus, lors de l’initiation de la traction, l’une des épaules/scapulas s’élève avant l’autre. Une autre bonne façon d’observer une dyskinésie des scapulas est d’observer celles-ci lors d’une simple flexion ou abduction (front raise ou lateral raise) des épaules jusqu’au-dessus de la tête. Lorsqu’une problématique est présente, le mouvement d’une des scapulas est erratique. Celle-ci bouge moins fluidement que l’autre et l’épaule, encore une fois, n’est pas à la même hauteur que l’autre lors du mouvement. Ces phénomènes sont d’ailleurs très fréquents chez les individus qui ont pratiqué très peu d’activités physiques qui impliquent d’avoir les 

bras en overhead. 

Dans de tels cas, la musculature n’est pas adaptée à ce type de travail et nécessite un conditionnement plus progressif. Si la progression n’est pas adéquate et/ou si le volume d’entraînement est trop élevé, la dyskinésie qui provoque une réduction de l’espace sous-acromial engendrera une tendinite au niveau de la coiffe des rotateurs ou du long chef du biceps brachial. Une progression adéquate implique d’apprendre à mieux contrôler les mouvements fins de la scapula en augmentant le degré de conscience. Elle implique également un renforcement adapté des muscles stabilisateurs des scapula et de l’épaule grâce à des exercices de rétraction scapulaire, de protraction et autres. Finalement, il est aussi important de traiter les limitations de mobilité qui peuvent causer ou aggraver la dyskinésie

Attention aux scap pull-ups!

Un abaissement scapulaire (mouvement exécuté lors d’un scap pull-up) n’est pas uniquement effectué lorsqu’accroché à une barre à traction. En réalité, il est relativement rare de voir un individu qui est apte à effectuer ce type d’abaissement scapulaire de façon adéquate pour renforcer les muscles ciblés. Un individu avec des abaisseurs scapulaires (trapèzes inférieurs) faibles (donc la plupart d’entre nous considérant nos modes de vie plutôt sédentaires) n’est simplement pas suffisamment fort pour effectuer ce mouvement avec le poids de son corps. D’autres muscles compensent lors du mouvement et les muscles ciblés ne se renforcent donc pas. Pour éviter une telle situation et réellement renforcer ces muscles, il existe divers exercices qui n’impliquent pas le poids du corps et dont l’exécution est plus lente et le mouvement plus fin. (Voir les exercices dans le bas de la page.)

Une mauvaise mécanique de mouvement peut également réduire l’espace sous-acromial et altérer l’engagement musculaire adéquat. En effet, lorsqu’un mouvement de poussée au-dessus de la tête, par exemple, est effectué avec une mécanique défaillante (le dos incliné vers l’arrière ou les coudes qui pointent excessivement vers l’extérieur), les chances que certains muscles compensent pour ceux qui sont plus faibles augmentent énormément. Elles augmentent encore davantage si le mouvement est effectué trop rapidement. D’ailleurs, lorsque la technique n’est pas encore acquise à 100%, les différents muscles responsables du mouvement ne sont pas en mesure de se coordonner adéquatement pour exécuter un mouvement optimal. C’est ce que l’on nomme la coordination intermusculaire. Pour tous les mouvements, il existe un patron moteur de contraction musculaire optimal. Ce patron est acquis avec la pratique du mouvement, ce qui correspond à l’apprentissage moteur. Au début de l’apprentissage, le mouvement est moins fluide. Les muscles ne se coordonnent pas adéquatement entre eux lors de l’exécution du mouvement. Avec la pratique, ceux-ci enregistrent la bonne séquence de contraction et le bon degré de contraction pour effectuer le mouvement de façon plus efficace et sécuritaire. Toutefois, si la coordination intermusculaire est trop peu adéquate, l’espace sous l’acromion peut diminuer et les risques d’accrochage augmenter. De plus, des patrons de compensation vont certainement solliciter certains muscles en excès. Ceux-ci sont donc nécessairement plus à risques de blessures si le volume d’entraînement lié à ces mouvements fautifs est trop élevé. Il est donc primordial de mettre l’accent sur l’apprentissage de la technique adéquate et de s’entraîner avec des charges qui permettent de maintenir cette technique.

La mobilité thoracique est un autre facteur majeur qui peut provoquer des blessures aux épaules. Un manque de mobilité de la colonne thoracique est souvent observable par la cyphose, une courbure prononcée du haut du dos causée par une mauvaise posture. En effet, les derniers degrés de flexion de l’épaule pour atteindre 180 degrés en overhead sont obtenus grâce à l’extension thoracique. Lorsque la mobilité est réduite, ces derniers degrés sont alors inatteignables et certains patrons de compensation apparaissent, tels que l’élévation de la cage thoracique et le décalage de la tête vers l’avant. Ces patrons de compensation peuvent, d’ailleurs, créer d’autres problèmes. De plus, lorsque la cage thoracique n’est pas positionnée optimalement, les scapulas ne sont pas en mesure de bouger normalement. Par conséquent, l’espace sous-acromial est réduit et les risques d’accrochage augmentent considérablement. Il est donc recommandé de maintenir un bon niveau de mobilité thoracique pour éviter les blessures aux épaules. 

Pour résumer le tout, les blessures aux épaules en CrossFit sont principalement causées par une musculature mal adaptée à un volume d’entraînement excessif qui lui est imposé. Que ce soit causé par un manque de force, une dynamique de mouvement altérée des scapulas, une mauvaise technique, un manque de mobilité thoracique ou autres, les blessures aux épaules ne devraient pas survenir. Pour ce faire, le corps doit être conditionné progressivement à résister aux stress auxquels il n’est pas habitué. Les structures doivent être renforcées, une meilleure conscience du corps doit être établie, la bonne mécanique de mouvement doit être pratiquée, les restrictions de mobilité doivent être traitées et, surtout, le volume d’entraînement doit être équilibré. La clé est donc la patience, car ces éléments prennent du temps à travailler. Le processus ne devrait jamais être accéléré, malgré l’engouement pour le sport. 

Il est temps d’arrêter de blâmer le CrossFit pour les maux d’épaules!

Exercices 

Exercices pour les trapèzes inférieurs

⇒ Ces exercices ciblent les trapèzes inférieurs dont le rôle principal est d’abaisser les omoplates. Pour être en mesure de réellement les utiliser et donc de les renforcer pendant le mouvement, les trapèzes supérieurs doivent donc être détendus. 

Reach Roll and Lift

https://www.youtube.com/watch?v=SacmuL4KHr8

Points Techniques :

  • Front déposé sur le point de la main opposée.
  • Reach : Étendre le bras en diagonale vers le haut. Le bras devrait être droit.
  • Roll : Effectuez une rotation de la main vers l’extérieur. Le pouce devrait alors être vers le haut. 
  • Après avoir roulé la main vers l’extérieur, tirez l’épaule (aka l’omoplate, car celle-ci guide l’épaule) vers le bas.
  • Lift : En maintenant l’épaule vers le bas, décollez la main du sol d’environ 1 à 2 pouces. Si l’épaule ne peut pas être maintenue vers le bas, alors allégez simplement la main sans la décoller du sol. 
  • Détendre le plus possible les trapèzes supérieurs pour éviter de compenser pour les trapèzes inférieurs que l’on essaie de renforcer grâce à cet exercice. 

Prone Retract and Reach

https://www.youtube.com/watch?v=K_Pz_XikKBc

Points Techniques : 

  • Conservez le front au sol.
  • Les bras sont étendus le long du corps en pleine extension et les paumes vers le sol. 
  • Décollez les épaules du sol.
  • Tirez les épaules (aka les omoplates) vers le bas.

Exercice pour le Dentelé Antérieur 

⇒ Cet exercice cible principalement le dentelé antérieur dont le rôle principal est d’éloigner les omoplates l’une de l’autre et vers l’avant. Attention! Si les rhomboïdes sont trop tendus, les dentelés seront plus difficiles à activer. Dans un tel cas, massez les rhomboïdes (muscles entre les omoplates) avant de faire l’exercice suivant.

https://www.youtube.com/watch?v=XwQEKFHYBHw

Points Techniques : 

  • Déposez les avant-bras sur le mur. Ceux-ci doivent être parallèles ou légèrement en forme de V (coudes vers l’intérieur et poignet un peu plus à l’extérieur).
  • Éloignez les omoplates l’une de l’autre et maintenez-les dans cette position pendant l’exercice.
  • Baissez les épaules (aka les omoplates) vers le bas et maintenez-les dans cette position pendant l’exercice. Ce sera relativement difficile et c’est normal.
  • Débutez en poussant les avant-bras sur le mur vers le haut sans approcher et sans monter les omoplates. Les coudes ne doivent jamais décoller du mur. L’amplitude de mouvement est donc limitée.
  • Placez un foam roller (ou autre) entre la poitrine et le mur pour éviter de compenser en poussant la poitrine vers le mur.
  • La sensation de contraction devrait être ressentie à environ 3-4 pouces sous l’aisselle et légèrement vers l’arrière.

 

 

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